On n’en avait pas assez sur les bras avec les projets d’exploration, d’exploitation et de transport des hydrocarbures non conventionnels sur le territoire québécois, qu’un autre projet, comportant d’importants risques pour la qualité de l’eau, faisait son apparition sur la scène de l’incompréhension. Certes, un projet qui n’est pas lié directement à l’exploitation des ressources naturelles, et d’un tout autre ordre de grandeur, mais un projet de plus qui ne s’inscrit aucunement dans un développement socio-économique durable.

Il y a bientôt près d’un an que plusieurs citoyens et organismes publics ont sonné l’alarme face à la volonté d’un promoteur d’Amqui de construire une station-service à proximité des trois seules stations de pompage d’eau potable de la municipalité. Le 22 avril dernier, après avoir été submergé par l’assaut informationnel incessant de plusieurs groupes de la société civile, le conseil municipal votait finalement contre le projet.

L’acharnement citoyen, c’est payant

Cette saga débuta officiellement lorsque l’ancien conseiller municipal, Jean-François Guay, décida d’alerter les médias en rapport avec ce qui se tramait à la ville. Des études hydrogéologiques, notamment la troisième étude commandée par la municipalité, démontraient clairement la grande vulnérabilité de l’aquifère à la contamination de la nappe d’eau. Pendant ce temps, la mobilisation s’orchestrait afin de sensibiliser la population à la menace du projet sur ce site.

Une pétition fut rédigée et les médias furent invités à une conférence de presse. La campagne d’information, menée sur le terrain, a permis de récolter plus de 600 signataires provenant essentiellement de la vallée de la Matapédia. Plusieurs organismes, dont l’organisme de bassin versant Matapédia-Restigouche (OBVMR), ont contribué de manière significative à ce dossier, grâce à leur expertise, en faisant valoir les risques socio-économiques et environnementaux dudit projet auprès de la population ainsi que des élus.

Malgré tout, le conseil adopta, à majorité, le désir de poursuivre dans le sens d’une éventuelle modification du règlement de zonage tout en affirmant que sa décision n’était pas encore définitive. Vraisemblablement, il aura fallu attendre les prises de position défavorables au projet venant du directeur de l’Agence de la santé et des services sociaux du Bas-Saint-Laurent ainsi que du Centre de santé et de services sociaux (CSSS) de La Matapédia, avant que le conseil ne ferme la porte une fois pour toutes.

Nous ne savons toujours pas pourquoi le conseil a pris autant de temps avant d’emprunter la voie de la sagesse. Par contre, une chose est certaine: sans la volonté et l’acharnement d’une poignée de citoyennes et de citoyens voulant préserver le bien commun, ce projet aurait vu le jour.

Une victoire citoyenne qui fait du bien

Nous avons réussi à convaincre les élus d’opter pour la protection du bien commun. Bravo! L’intelligence citoyenne est à l’œuvre.

Cette victoire démontre que la mobilisation citoyenne peut mettre en échec les projets néfastes. C’est même peut-être la seule façon d’amener nos décideurs à prendre les décisions dans l’intérêt collectif, comme l’a démontré la victoire de la rue contre le projet de centrale thermique du Suroît il y a quelques années.

Laçons nos souliers avec confiance, car il faudra marcher de plus en plus souvent, et nous réussirons à faire entendre raison à nos élus, pour qui ne compte que le nombre de votes aux prochaines élections.

Une victoire qui doit se répéter

En ces temps sombres où l’on voit se développer, à tout vent, des projets qui favorisent une privatisation des profits en socialisant les risques et les pertes socio-économiques, l’heure n’est plus à la défaite.

Nous ne pouvons plus accepter, en tant que collectivité, des décisions qui font fi de l’acceptabilité sociale, de la science et de la qualité de vie. Le Québec se voit plus souvent en mode lutte qu’en mode «bâtissons l’avenir». La qualité de nos milieux de vie, et de notre avenir sur ce territoire, ne peut plus être dictée par des orientations capitalistes destructives du tissu social et de l’environnement.

Il est grand temps de redéfinir le contrat social, avec nos dirigeants, afin que les collectivités puissent davantage décider de leur propre développement en fonction du bien commun.

Le Québec peut encore déployer ses ailes, notamment celles des énergies renouvelables. Devenons ce que nous sommes réellement, au plus profond de nous-mêmes. Prenons enfin notre envol vers la liberté.

Devenons un modèle phare pour le reste du monde, nous ne pouvons plus nous laisser mourir en attendant les directives. Encore enracinés tant bien que mal, dorénavant, nous accepterons seulement les projets viables.