Le gouvernement tarde toujours à débloquer les 15 millions de dollars demandés par la Fédération des coopératives de services à domicile et de santé du Québec (FCSDSQ) pour pallier la non-indexation du programme d’exonération financière pour les services d’aide domestique (PEFSAD) entre 1997 et 2009.

Seulement six millions ont été versés aux entreprises d’économie sociale en aide à domicile (EÉSAD), un manque à gagner qui diminue l’accessibilité des services.

«60 000 $, c’est ce que ça coûte annuel­lement pour maintenir quelqu’un dans un centre hospitalier de soins longue durée (CHSLD) du Québec, confirme J. Benoît Caron, directeur général de la FCSDSQ. Il est beaucoup plus rentable de garder les gens actifs chez eux, car en centre d’hébergement, ils ne consomment plus. Les propriétaires de maison, eux, continuent d’emplir les coffres du Trésor public, en payant des taxes.»

Le sous-financement des entreprises offrant des services d’aide à domicile entraîne une augmentation des coûts de services pour tous les membres d’une coopérative, soit d’environ 8$ par visite depuis 1997. «Ce sont les moins fortunés qui écopent», rappelle Guy Baillargeon, directeur de la Coopérative de solidarité d’aide domestique de Shawinigan, qui dessert 700 membres. Il ne va pas sans dire que plus les tarifs doivent augmenter, plus les gens ont recours aux services privés ou aux travailleurs au noir.

Selon J. Benoît Caron, l’augmentation du salaire minimum de 1,75 $ en cinq ans ainsi que des frais de déplacements propulsent les tarifs horaires. «Ces entreprises sont à but non-lucratif. Elles s’assurent seulement de couvrir leurs frais, mais parfois, elles n’y arrivent même pas.» Pour cela, il est difficile d’offrir un salaire compétitif au personnel membre. «Cela défavorise le recrutement d’employés qualifiés, qui vont voir ailleurs, explique Guy Baillargeon. Comme il manque de main-d’oeuvre, il est aussi difficile de faire la promotion de l’entreprise.»

Vieillir chez soi

Richard Lefrançois, professeur titulaire de gérontologie à l’Université de Sherbrooke, considère que les aînés ont droit à leur juste part. «Les 50 ans et plus détiennent tout de même 50% des actifs de la province de Québec. En plus de leur savoir, ils font tourner la machine économique avec leurs placements», soutient-il en rappelant qu’ils sont aussi les plus actifs dans la vie démocratique. Pour lui, un programme de maintien et d’aide à domicile serait bienvenu au Québec. «Toute personne préfère vivre dans son environnement familier, dans lequel il a vécu pendant des années. Vivre dans sa maison, en famille ou avec son conjoint, est un rêve que caressent tous les aînés.»

En novembre 2011, la ministre responsable des Aînés, Marguerite Blais, a confirmé vouloir mettre tous les moyens en œuvre pour aider les aînés à se tailler une place dans la vie active, dans le cadre du futur programme Vieillir chez soi. «Une récente étude de Statistique Canada sur la population active montre que 92 700 emplois sont occupés par des aînés et que ce nombre ne cesse d’augmenter», a déclaré la ministre. Selon elle, «la mise en œuvre de la politique Vieillir chez soi aura pour effet de permettre aux personnes aînées de bien vivre chez elles, quel que soit le lieu où elles vivent».

J. Benoît Caron a des pensées positives face à cette future politique. «On souhaite que les EÉSAD et le PEFSAD fassent partie de ce programme, car ils contribueront ensemble à la cause des aînés.» Selon lui, le recours aux services d’aide à domicile provenant d’entreprises à but non-lucratif est un moyen concret et tangible de mettre en œuvre la politique. Mais il réclame toujours 10 millions de dollars de plus pour les EÉSAD et le PEFSAD.

Pour l’Association québécoise des retraités du secteur public et para-public (AQRP) du Centre-du-Québec,  présidée par Carol Boulanger, les revendications sont semblables. «Nous demandons plus d’argent pour offrir de meilleurs soins aux aînés et un meilleur soutien aux entreprises d’économie sociale offrant des services à domicile. Nous souhaitons par le fait même aider les proches et les aidants naturels des retraités en difficulté, explique Carol Boulanger. C’est pour nos 25 000 membres dans la région que nous faisons des recommandations au gouvernement.»à

La région de Trois-Rivières est un endroit où il fait bon vivre pour les aînés, selon une étude de Richard Lefrançois. Tout comme la ville de Sherbrooke, Trois-Rivières présente une population plus vieillissante qu’ailleurs au Québec.  «Il y a donc plus d’activités pour les aînés, la vie associative beaucoup plus forte, explique le professeur. Dans cette région, les aînés vivent beaucoup plus dans leur maison. Ils sont bien entourés, car la vie familiale semble y être beaucoup plus développée.» Selon les données de l’AQRP, seulement 13% des personnes âgées vivent en habitations collectives. Des 42 300 aînés de la région, 60% vivent dans des ménages privés.