À la boutonnière, un carré rouge fleurissait, autre symptôme du ras-le-bol populaire. Profitant de la journée de la Terre, les étudiants ont joint leurs voix et leurs slogans à la cause environnementale. Animés d’un désir d’une société plus à leur image, leurs revendications coulent dans ce qu’ils appellent le printemps érable.

Près de 300 000 citoyens sont descendues dans les rues de Montréal pour souffler un vent de changement. Pour Jean-Marie Lafortune, vice-président du syndicat des professeurs de l’Université du Québec à Montréal, la cause du développement durable va de pair avec la justice sociale. «La hausse des frais de scolarité est en contradiction avec l’idée de poursuite du bien commun qui passe par l’accessibilité aux services publics. L’éducation post-secondaire est l’un de ces services publics qui est actuellement menacé par le gouvernement libéral.»

Le vent tourne et le mouvement s’amplifie pour faire naître le printemps érable, clin d’œil au printemps arabe de 2011. Sorti de leurs terriers, le Rabbit Crew est venu faire un saut dans la manifestation. Groupe de revendications pour le mouvement étudiant, ils préfèrent les carottes et l’humour plutôt que le bâton. «Il faut une échappatoire et réussir à avoir du plaisir en même temps que l’on revendique», lance Leap Artist, personnage d’un des membres fondateur du groupe. Sur le ton railleur, son acolyte Sir Jump-a-Lot explique que leur présence est nécessaire à la journée de la terre. «Charest s’en fout de la terre et il brise nos terriers. C’est important pour nous, le Rabbit Crew, d’avoir de bonnes maisons.»

Idéologie gréviste en tête avec une touche de comique, ils étaient d’abord présents pour supporter la cause citoyenne. «Parce que c’est rendu beaucoup plus gros qu’un mouvement étudiant. C’est rendu un mouvement social, raconte Leap Arstist. Tout le monde trouve sa place et sa cause à l’intérieur. Ça affecte toute une société.» Benoît Couture, manifestant et démarreur d’une entreprise d’horticulture et de jardinage en Mauricie, rebondit sur ces propos. «Important et nécessaire parce que le jour de la terre et l’appel du printemps québécois visent toute la population, mais surtout les étudiants. C’est la prochaine génération qui prendra la relève et décidera de l’avenir collectif.»

Malgré le nombre de citoyens dans les rues, Jean-Marie Lafortune reste sceptique vis-à-vis les réactions du gouvernement. «Le 22 mars, nous étions 200 000 dans les rues pour dire au gouvernement que nous n’étions pas d’accord et rien n’a bougé du côté du pouvoir. Ce gouvernement ne veut rien entendre.» Conscients que la partie est loin d’être terminée, Sir Jump-a-Lot confirme la présence du Rabbit Crew dans les prochains épisodes du printemps érable: «Il ne faut pas disparaître avant que les choses changent. Sinon, on va avoir perdu sur toute la ligne.» Confiant de l’ardeur des militants, Jean-Marie Lafortune croit qu’il revient maintenant aux leaders politiques d’agir. «La balle est maintenant dans le camp du gouvernement parce que c’est lui qui est en train de sacrifier la session des étudiants et certains pans du développement économique par son inaction.»