L’appel lancé cet automne à l’initiative de Gabriel Nadeau-Dubois, Jean-Martin Aussant et Claire Bolduc a été entendu. Le succès de l’exercice baptisé « Faut qu’on se parle » est réjouissant. La rencontre de clôture avec le public aura lieu à Montréal le 8 décembre prochain.

« En général dans les médias, on entend beaucoup parler de course à la chefferie, de divisions du vote, de convergence, d’alliance, a lancé Gabriel Nadeau-Dubois avant-hier soir à Rimouski. Nous aussi on tombe dans ce piège-là. On perd tellement de temps à parler de stratégie et de tactiques qu’on ne parle pas de ce qu’on veut faire. Au-delà de tel ou tel parti, qu’est-ce qu’on veut faire du Québec? Il faut se concentrer sur les enjeux de fond. »

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Vraisemblablement, la question de l’avenir du Québec passionne beaucoup plus la population que ce que les médias traditionnels veulent bien le laisser croire. Surtout quand le débat se fait à l’extérieur de l’arène politique, comme c’est le cas ici.

Le Québec en avait long à dire

Le groupuscule à l’origine de « Faut qu’on se parle » a eu tellement d’appels au dialogue qu’il a dû aller chercher du renfort pour pouvoir multiplier les assemblées de cuisine à travers le Québec. Au final, neuf personnes se sont chargées d’aller visiter les Québécois dans leur patelin, comme ce fut le cas du Dr Alain Vadeboncoeur, de passage au bistro Le Mouton Noir de Val-David hier soir.

« On pensait faire 30 à 40 assemblées de cuisine, on en aura fait près de 200. Ça montre l’intérêt des gens. »

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Fait à noter, 60 % des rencontres ont eu lieu à l’extérieur de Montréal. Et le succès ne s’est pas démenti. Ils étaient 250 participants à Rimouski, 400 à Sherbrooke et 1200 sont attendus dans la métropole jeudi soir prochain. Les appels aux dons auront permis à la petite équipe mobilisée de se rendre dans des contrés éloignées, y compris aux Iles de la Madeleine.

« On n’a pas de ligne de parti, on n’est pas d’accord sur tout mais on est d’accord sur une chose, a clamé Gabriel Nadeau-Dubois à Rimouski. À bien des égards, le Québec est bloqué. C’est un sentiment qu’on avait au début de la tournée et qui s’est confirmé au fur et à mesure qu’on a rencontré des milliers de Québécois et Québécoises qui, partout sur le territoire, nous l’ont dit. »

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Cet appel à la discussion a interpellé jeunes et vieux. Démocratie, éducation, environnement, santé, tous les thèmes y sont passés. Ne faisant pas exception à la règle, le cégep de Rimouski a réuni pèle-mêle imberbes et têtes blanches. Attablés par dizaines, les uns comme les autres se sont concertés pour dégager des avenues porteuses pour le Québec de demain.

À Val-David aussi ça jasait ferme, rejetant ici énergies fossiles et suremballage, favorisant là les circuits courts, l’autonomie des régions, l’agriculture verte, la souveraineté alimentaire, l’imputabilité des élus et des corporations, le retour en force du chanvre, ou la fin de l’embouteillage de l’eau. Certains ont même appelé à sa nationalisation, en souhaitant toutefois un modèle plus transparent que celui offert par Hydro-Québec et l’hydroélectricité, alors que d’autres ont souhaité rien de moins que la création d’un ministère de l’eau.

Des idées à la pelle

« L’éducation est le terme le plus populaire, a précisé le Dr Vadeboncoeur. Les inquiétudes sont palpables. Ne serait-ce que les difficultés physiques rencontrées par les établissements scolaires. Et ce qui ressort, c’est qu’il faut sortir l’école de l’école. »

Aux yeux de Bernard Généreux, ancien président de l’Union des municipalités du Québec et directeur général de Val-David, le taux de décrochage et l’analphabétisme démontrent l’échec du système. « À chaque fois qu’on perd quelqu’un qui ne rentre pas dans le moule, c’est une perte pour la société. » Un participant a renchérit : « Ce n’est pas ce que ça va coûter de régler la situation comme ce que ça va coûter de ne pas le faire. »

Sur un autre ordre d’idée, M. Généreux a rappelé qu’il faut « revoir notre rapport au territoire ».

« On a perdu le sens de la solidarité. Comment retrouver le goût du collectivisme avec les modèles de gouvernance figés que l’on a? »

Deux jours plus tôt à 630 kilomètres de là, Claire Bolduc, ancienne présidente de Solidarité rurale, demandait en préambule : « Actuellement, on le constate, on ne permet pas à toutes les régions du Québec de déployer leur plein potentiel. De quelle manière peut-on travailler sur nos économies régionales? Est-ce qu’on est face à une corruption endémique à laquelle on ne peut plus rien dire? De quelle façon les citoyens peuvent-ils faire entendre leurs voix? Est-ce que ce sera sur l’enjeu du mode de scrutin?»

fautquonseparleweb_11« Est-ce qu’en tant que citoyens, on doit exiger certains pouvoirs comme la prise de décision collective? Ce n’est pas une utopie, ça se fait dans d’autres sociétés. »

Mme Bolduc a rappelé que « 91 % des nouvelles viennent de Montréal ou Québec et quelquefois Saguenay. Et quand on parle des régions, c’est pour parler de drames : Lac Mégantic, L’Isle-Verte, Val-d’Or ».  Cette fois, le Québec en entier a été écouté. Ses propos seront regroupés dans un ouvrage à paraître en 2017. « On veut publier quelque chose rapidement, afin que les propositions retenues fassent l’objet de débats pour la prochaine campagne électorale », d’indiquer Alain Vadeboncoeur.