La démocratie incarne à la fois l’individualité et la solidarité, puisqu’elle exige la présence d’individus responsables, instruits de la finalité poursuivie par une collectivité. Ceci exige la solidarité à la décision de la majorité des membres exerçant leur droit de vote. Il est donc clair que l’assemblée générale des membres d’une entreprise ou association sous contrôle démocratique est souveraine.

Et ce pouvoir souverain n’est pas transférable: il ne peut être abandonné. Une législation coopérative qui permettrait un tel abandon par l’assemblée générale des membres devrait être considérée comme étant «anticonstitutionnelle», ou contraire à la finalité de la coopérative. On ne peut, en effet, imaginer une assemblée générale d’une coopérative qui renoncerait à sa souveraineté.

D’ailleurs, à l’origine, le grand philosophe Aristote proposait que ne soient admis comme membres que des individus qui peuvent, en moins d’une journée de marche, se rendre à l’agora pour participer aux assemblées démocratiques! Aristote était conscient que la démocratie est mieux respectée lorsqu’on rend facile la participation aux assemblées!

Mais, on le sait, au fil du temps, les moyens de communication se développant, les coopératives comptent souvent aujourd’hui un nombre imposant de membres. Et pour des raisons de gouvernance efficace, les assemblées générales de membres de ces coopératives ont préféré confier à leurs élus certains de leurs pouvoirs ou, plus tard, ont décidé de se fédérer en confiant de nombreux pouvoirs à une fédération leur appartenant, sur lesquels ils n’ont plus, comme membres, à se prononcer.

On en est venu à croire, au fil du temps, que ces pouvoirs appartenaient aux fédérations et que les coopératives locales avaient renoncé à ces pouvoirs. Or, une telle renonciation, comme je le disais plus avant, est contraire à la philosophie coopérative.

Ce n’est pas parce qu’un souverain cède l’exercice de certains pouvoirs à des institutions qu’il a créées, qu’il renonce à… sa souveraineté. Trop souvent, les corporations formées par les coopératives agissent comme si elles possédaient des pouvoirs souverains.

Il faut se méfier de l’influence du corporatisme capitaliste – qui est dominé par ceux qui détiennent le pouvoir du capital majoritaire. Les corporations coopératives créées par les membres des coopératives locales doivent demeurer «dominées» par la souveraineté des coopératives locales.