Au cours de la matinée, des activistes de l’Association Terriens ont formé une chaîne humaine afin de bloquer l’arrivée de bétaillères à l’abattoir Marvid de Montréal-Nord, seul endroit du genre dans la métropole. Le groupuscule pourfend l’exploitation animale et en appelle à un débat national sur la question.

Terme mieux connu en Europe, le spécisme est à l’espèce, ce que le racisme et le sexisme sont à la race et au sexe. Et c’est bien de cela qu’il s’agit quand on parle d’exploitation animale, même quand il est question de nourrir la planète, souligne Frédéric Thériault, co-fondateur de l’Association Terriens.

L’activiste explique: « On s’attaque à un symboleOn boycotte tout ce qui est dérivé de près ou de loin aux animaux. »

Vegan, donc? « Pour moi, ce terme ne veut pas dire grand-chose. Mon choix est éthique et moral et ne concerne pas seulement la viande mais le cuir, les produits testés sur les animaux et autres. » La question est légitime et l’association n’hésite pas à la poser : Comment peut-on manger du porc alors qu’on parle à nos chiens et nos chats?

Des activistes à l’oeuvre

Fondée officiellement en 2015, l’association québécoise revendique la fin de la discrimination entre les êtres vivants. Le regroupement se spécialise dans les actions directes de protestation et de désobéissance civile et vise à se faire entendre des autorités compétentes afin de susciter la discussion au sein de la population.

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Quelques gestes d’éclat ont valu à Frédéric Thériault 45 heures de travaux communautaires, 500 dollars d’amende et un an à garder la paix. L’été dernier, il a été accusé de méfait public pour avoir déroulé une immense banderole du haut d’un lampadaire au rodéo extrême tenu à l’Exposition agricole de Saint-Hyacinthe.

En 2014, l’activiste s’est enchaîné à une barricade pour protester contre la course de cochons graissés de Sainte-Perpétue, une activité qui attire près de 40 000 spectateurs. L’ancien hockeyeur George Laraque a dénoncé cette pratique vieille de 1978 en appelant au boycott de l’événement. L’année auparavant, Frédéric Thériault s’est installé « comme un chien dans une cage » devant le Parlement de Québec. L’activiste a également participé à des manifestations en association avec la Kebek Animal Rights Association (Kara), le Mouvement de Libération et le groupe Résistance animale. Ailleurs dans le monde, des groupes n’hésitent pas à faire croire à des cobayes qu’ils boivent du lait de chienne pour illustrer le paradoxe dans lequel ils vivent.

À l’aube d’une conscientisation

Dans la mini-série vidéo intitulée Éthique animale, Carl Saucier-Bouffard, professeur en éthique environnementale et animale au Collège Dawson et chercheur associé au Centre sur l’éthique animale de l’Université Oxford soutient qu’une idéologie discriminante dominante est essentiellement invisible. « Malheureusement, la France, le Canada et le Québec, sont parmi les sociétés les plus spécistes. »

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L’idée fait toutefois son chemin, en partie grâce aux dénonciations d’associations telles L214, du nom d’une législation française qui stipule que « les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité.»

 

 

Il ne faut pas l’être quand on voit les vidéos qui circulent sur Facebook afin de dénoncer la maltraitance à l’égard de nos amies les bêtes. Par ces images choc, L214 a réussi à faire fermer des abattoirs français. 

L’Association Terriens indique que l’action directe de ce matin marquera d’ailleurs le début d’une série de manifestations du genre, prévient le groupuscule.

Des données impressionnantes

Le 4 décembre 2015, l’Assemblée Nationale adoptait une nouvelle loi sur le statut juridique des animaux, stipulant du coup que ces derniers sont doués de sensibilité. Le regroupement a souligné ce premier anniversaire dimanche dernier en interpellant la population montréalaise avec des slogans. Dans les faits, rien n’a changé, souligne l’Association Terriens. « Des endroits tels que l’abattoir d’oiseaux Marvid continuent de tourner à plein régime

« À quoi bon reconnaître qu’ils sont doués de sensibilité et qu’ils ont des impératifs biologiques si c’est pour continuer à les instrumentaliser pour notre simple plaisir gustatif ? », questionne la chercheure indépendante Élise Desaulniers sur son blogue.

Chaque année au Québec, l’industrie de l’élevage exploite et tue plus de 190 millions d’oiseaux, dont 6 millions de poussins tués à la naissance et 3,8 millions de poules pondeuses (98 % d’entre elles vivent en cages grillagées, sans perchoir ni nid et ne vont jamais dehors), soutiennent les activistes.

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Selon le planetoscope, 1900 animaux sont abattus chaque seconde dans le monde pour fournir de la viande, ce qui représente 60 milliards de bêtes par an. On sacrifierait également 3000 milliards de poissons chaque année.

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« Si les humains se tuaient les uns les autres à la même cadence, notre espèce serait éteinte en 17 jours, peut-être même en une seule semaine », indique l’Association Terriens.

Dans un communiqué émis ce matin, les membres de l’Association Terriens ne mâchent pas leurs mots. « C’est l’absolu scandale de notre temps. Demain, tout le monde considérera comme une évidence absolue que l’espèce humaine est une espèce animale parmi d’autres et qu’en conséquence, ce qui se passe aujourd’hui dans les abattoirs s’appelle de l’assassinat. »

Signe des temps? À l’occasion de ses 30 ans, l’assiette du Bocuse d’Or 2017 devra être 100 % végétale. Une première pour ce prestigieux concours culinaire.