La toile sociale de l’Outaouais n’est pas tissée uniquement de pures laines. De fil en aiguille, la culture de la région s’est étoffée avec la venue d’immigrants amenant dans leurs bagages des idées, des saveurs ainsi que des rites venant d’ailleurs. Gatineau a célébré pour la septième fois, le dimanche 21 août, sa diversité culturelle. Son thème choisi rappelle une expression québécoise appliquée à sa réalité ethnique : Gatineau, une ville tricotée serrée.

La Journée gatinoise de la célébration de la diversité culturelle offrait plusieurs activités pour tous les âges. Des spectacles colorés illuminaient la scène principale par le chant et la danse. Des mets de partout autour de la planète s’offraient aux gourmands curieux dans un salon portant bien son nom : Saveurs du monde. Le marché artisanal et le salon des artistes exposaient des objets exotiques. Les citoyens avides d’information pouvaient aussi se renseigner auprès des kiosques thématiques. Des courts métrages étaient présentés toute la journée pour éclairé les enjeux vécus par les immigrants.

Plusieurs activités se voulaient interactives pour éveiller la créativité des citoyens. Le Mini Club International amenait le thème de la diversité culturelle dans les bricolages, les maquillages et les lectures des enfants. Planète-Ado donnait la possibilité de s’exprimer à travers le thème de la journée avec des artistes-graffiteurs. Une murale faite par de jeunes Gatinois sous la direction de Marcio Melo, un artiste de la région aux origines brésiliennes, fut inaugurée pour illustrer leurs perceptions des différentes composantes de leur communauté.

Dialogue entre ici et ailleurs, la Maison du citoyen voyait la société gatinoise se raconter à elle-même par les différents points de vue de ses communautés culturelles. Pour la conseillère municipale et responsable du dossier de la diversité culturelle, Mireille Apollon, c’est une occasion de souligner le développement social amené par l’immigration. Le président de la Commission des arts, de la culture, des lettres et du Patrimoine, Stefan Psenak, ajoute que « cet évènement démontre notre diversité artistique locale et notre dynamisme. »

Pour mieux comprendre l’autre

Pour le professeur agrégé en sociologie à l’Université d’Ottawa, Philippe Couton, le côtoiement interculturel entraîne des échanges positifs. Ceux-ci se reflètent dans la politique, l’économie, le milieu artistique, les innovations et plusieurs aspects sociaux. « Cependant, la xénophobie et les incompréhensions viennent parfois semer des comportements interculturels hostiles. » À son avis, une initiative comme la Journée gatinoise de la célébration de la diversification culturelle est un pas vers l’avant. « C’est une mise en contact, une façon de publiciser les cultures pour mieux comprendre l’autre. » Il est difficile de résumer une culture puisqu’elles sont toutes complexes. « Il y a donc un risque de folkloriser, de créer des stéréotypes. C’est comme résumer les Québécois à la poutine », illustre-t-il. Ce genre d’évènement entraîne tout de même davantage d’aspects favorables, dont l’éveil de la curiosité des individus.

« Vu le tissu social de l’Outaouais, c’est une nécessité d’avoir une telle journée pour encourager le rapprochement interculturel », déclare l’agente à la diversité culturelle, Manuelle Ann Boissonneault.  Des recherches de Theodomir Muligo, doctorant de l’Université du Québec en Outaouais et de Ramana Zanfongnon, démographe de la ville de Gatineau, démontrent que la région accueille près de 1 500 citoyens immigrants par année. Il est aussi dit qu’un Gatinois sur dix est né à l’étranger.

Groupes d’accompagnement

Avec autant de gens venant d’autres pays, l’Outaouais compte plus de 80 groupes d’accompagnement. Ces groupes permettent une meilleure intégration aux nouveaux venus. Des coups de pouce pour trouver un logement aux conseils pour ouvrir un compte de banque, c’est une aide importante qui leurs est offerte, explique Manuelle Ann Boissonneault. Ces organismes qui offrent information, recommandations et soutien étaient présents le 21 août. « La Journée gatinoise de la célébration de diversité culturelle, c’est aussi une belle occasion pour se rencontrer et travailler ensemble. »

Voilà quelques années que le débat des accommodements raisonnables est venu secouer  la symbiose culturelle au Québec. « Cela a porté ombrage aux belles rencontres quotidiennes entre cultures », admet la professeure agrégée en anthropologie à l’Université d’Ottawa, Natacha Gagné. Plusieurs communautés vivent avec peu de frictions poursuit-elle en citant l’exemple de Gatineau.

Étant de plus en plus multiculturelle, cette ville accueille des gens de partout autour de la planète. « L’ouverture et l’esprit d’entraide chez les Gatinois sont des points qui sont souvent perçus par les immigrants. La réaction des citoyens de Gatineau envers l’immigration est hyper positive », précise Manuelle Ann Boissonneault.

Entre le rythme effréné des tambours africains, l’odeur exotique de la cuisine chinoise et les danses latines, l’Outaouais réussit à se tisser une identité. Quoique toutes différentes, chacune des mailles connecte avec la suivante parce que les citoyens emmitouflés dans le tissu social y sont tricotés serrés