On rêve tous un jour ou l’autre de changer le monde. Certains font plus qu’y songer, ils passent à l’action. Ils sont plusieurs milliers au Québec à mettre de l’avant des solutions pragmatiques et novatrices dans le but de favoriser le changement et l’innovation sociale; à utiliser des principes entrepreneuriaux pour créer et gérer des organisations qui répondent à des besoins précis; à faire preuve d’une éthique indiscutable; à travailler de pair et à impliquer les communautés concernées dans leur projet; à partager leurs expériences afin de favoriser le transfert des connaissances; à démontrer un leadership exemplaire et à réaliser des projets aux retombées sociales durables. On les appelle : les entrepreneurs sociaux.

L’Institut du Nouveau Monde (INM), en partenariat avec divers acteurs sociaux, offre des bourses afin de soutenir les entrepreneurs sociaux en démarrage. Un investissement total de 22 500 $ rendu possible par la participation de plusieurs partenaires. Voici le portrait de deux nouvelles coopératives qui se sont vu décerner une bourse de 2500 $ de la Caisse d’économie solidaire Desjardins, dans le cadre du programme À go, on change le monde!

Les Rack Modeuses : par et pour les gens du milieu !

Les Rack Modeuses font plus que raccommoder! Les quatre jeunes femmes à la tête de cette coopérative de travail veulent ni plus ni moins empêcher les matières textiles de se retrouver dans des sites d’enfouissement de la Gaspésie. Ainsi, à partir de matières récupérées dans les friperies locales, elles créent entre autres des lignes de vêtements prêt-à-porter.

« Nous nettoyons les textiles, faisons le tri des morceaux pour ensuite rendre la fibre disponible à la création, non seulement pour nous, mais pour les designers intéressés », explique Julie Tessier, qui fait partie des quatre cofondatrices de la coopérative.

L’atelier de création de la coopérative, qui a pignon sur rue à Saint-Alexis-de-Matapédia, n’est pas encore ouvert au grand public, mais déjà pour la saison d’été, cinq boutiques de la Gaspésie tiendront quelques-unes de leurs collections.

En plus d’avoir créé leur emploi, Les Rack Modeuses prennent part chaque jour au développement local et durable. À leur façon, on peut donc dire qu’elles modèlent le monde!

Coopérative de solidarité Sutton

En 2010, à la suite d’importants réaménagements exigés par la CSST et faute de financement, l’entreprise privée Sutton en Haut et Arbre Sutton doit fermer ses portes.

Quatre des employés ayant à cœur la mission de l’entreprise décident de ne pas se laisser abattre et font tout le nécessaire pour qu’elle renaisse. À cœur vaillant, rien d’impossible… En mars dernier, la coopérative de solidarité Sutton voit le jour et vient assurer la pérennité des sentiers de ski de fond et de raquette de même que des parcours d’hébertisme aérien.

« Nous voulions conserver nos emplois, mais surtout ne pas voir s’éteindre tous les efforts qu’avaient déployés les fondateurs Steve Breton et Michel Dallaire depuis 2004 », confie Jean-Philippe Demers, qui fait partie des cinq promoteurs de la coopérative regroupant des membres utilisateurs et des membres de soutien.

Le 21 mai prochain, la coopérative fera son lancement officiel en ouvrant au grand public ses pistes d’hébertisme de même que ses sentiers de randonnée pédestre. Plusieurs partenariats avec le milieu font déjà leur chemin, si bien que quelques nouveautés sont à prévoir au cours de l’été.

Les boursiers présentent leur projet – Vidéo: Caisse d’économie solidaire Desjardins

Il a été impossible de rejoindre les responsables du projet Les marchés saisonniers des comptoirs urbains Tera Ter, qui recevront aussi une bourse de 2500 $ de la Caisse d’économie solidaire Desjardins. Selon les informations disponibles auprès de l’INM, leur projet vise à proposer des fruits et légumes frais de qualité à prix «raisonnable» à une clientèle défavorisée et/ou habitant  dans des secteurs qualifiés de déserts alimentaires.

Entre-nous, Les paniers du Kamouraska inc., et sa propriétaire Julie Sénéchal, se méritent la bourse offerte par la Fondation J. Armand Bombardier, d’une valeur de 5000 $. Il s’agit d’une entreprise qui propose un réseau alimentaire de proximité au Kamouraska.

Pour leur part, Annie Tremblay, Myriam Roussy, Kateri Monticone, Isabelle Boisvert, Sylvain Roussy ont reçu la mention « coup de cœur » pour leur projet de transformation de l’ancien magasin du village en café culturel, espace d’échange et de rassemblement pour les gens de Val d’Espoir, en Gaspésie.

Enfin, la Coopérative de journalisme indépendant, éditeur de ce portail d’information, est également récipiendaire d’une bourse de 2500 $ de la Caisse d’économie solidaire Desjardins.

L’entrepreneuriat social

Selon Anne-Laure Putigny, responsable du programme À go on change le monde! à l’INM, voit dans l’entrepreneuriat social une occasion de remettre les affaires au services de la société. « L’entrepreneuriat social est une forme d’engagement citoyen, une manière de participer concrètement au façonnement d’une nouvelle société. C’est également une nouvelle façon de voir les affaires et c’est aussi une partie de la solution à la crise du modèle capitaliste. »

Le concept inclut tout autant l’entrepreneuriat privé que les approches collectives d’économie sociale que sont les organismes sans but lucratif et les coopératives. Celles-ci sont dotées de structures démocratiques, tandis que pour l’entrepreneur social privé, la dimension sociale repose essentiellement sur son bon vouloir.

Force est de constater que la formule porte des fruits. Ashoka, organisation sans but lucratif, laïque et apolitique, qui se décrit comme le plus grand réseau d’entrepreneurs sociaux existant, compte 3000 entrepreneurs sociaux innovants (fellows) dans le monde, dont le fondateur de l’INM, Michel Venne. Leur nombre s’accroît de 300 nouveaux fellows chaque année et 94% d’entre eux continuent de développer leur organisation 5 ans après leur sélection. Toute cette activité socioentrepreneuriale bénéficierait à un total de 525 millions de personnes sur la planète.

À go!

Le programme À go on change le monde! vise autant à sensibiliser les jeunes à l’entrepreneuriat social qu’à les accompagner. Il prend appui sur l’école d’été de l’INM, depuis 2004, pour stimuler la création de projets par les jeunes. L’accompagnement offert passe par les bourses et la référence aux ressources existantes, ainsi que par un futur programme de formation.

Le programme connaît un franc succès, avec la participation d’un millier de jeunes par année et l’élaboration de 150 projets depuis son lancement en 2007. « Ce sont en grande partie des projets qui n’auraient pas vu le jour autrement, souligne Mme Putigny. Le programme À go donne un cadre sécurisant qui permet aux jeunes d’entreprendre. La forme d’engagement des jeunes a changé. Ils ont besoin d’en voir rapidement l’impact et l’entrepreneuriat est une façon d’y arriver. »

Tout comme Ashoka, À go se veut une plateforme de réseautage pour les entrepreneurs sociaux. En plus de l’école d’été, qui permet souvent aux jeunes de tisser des liens en bâtissant ensemble des projets, le Rendez-vous des entrepreneurs sociaux est une occasion pour eux de se rencontrer et représente une source de motivation et d’entraide. La deuxième édition du Rendez-vous se tiendra le 7 juin prochain à Montréal.

Avec Nicolas Falcimaigne