La coopérative est une organisation démocratique. Et quand il y a de la démocratie, la politique est toujours au rendez-vous. Les administrateurs doivent prendre des décisions dans l’intérêt de l’organisation, et les membres sont là pour veiller au grain ainsi que pour contribuer à orienter le conseil d’administration. Dans ce contexte, le rôle de la présidence constitue un élément stratégique majeur au sein d’une coopérative.

Mais la présidence demeure un rôle essentiellement politique. Légalement, peu d’avantages lui sont accordés.

Concrètement, la présidence du Conseil d’administration assume la présidence de l’ensemble de la Coopérative (art. 114 de la Loi). Cela signifie qu’un président ou qu'une présidente de conseil d’administration agit par défaut à titre de président ou de présidente d’autres instances de la coop, notamment les assemblées générales. Évidemment, il peut décliner la fonction et dans ce cas, les membres devront procéder à son remplacement.

De plus, la présidence dispose d’un vote prépondérant en cas d’égalité des voix (art. 93 de la Loi). En général, on observe chez un président ou une présidente une réserve dans la participation aux débats, mais on lui concède toutefois le droit, sinon même le devoir de trancher des questions qui ne suscitent pas de consensus chez les membres.

Par ailleurs, le pouvoir de convoquer des assemblées du conseil d’administration ou des assemblées générales extraordinaires revient généralement à la présidence (art. 77 et 93 de la Loi). Pour lui substituer ce pouvoir, deux administrateurs peuvent convoquer une réunion dans le cas d’un Conseil d’administration, ou encore une fédération dont fait partie la coopérative peut effectuer la convocation. Relativement à une assemblée générale extraordinaire, encore une fois une fédération peut prendre le relais et convoquer les membres, ou encore ces derniers peuvent procéder à une convocation par la signature d’une demande en ce sens, signée par plus du quart des membres de la coopérative.

Malgré tout, il est essentiel de se rappeler combien la présidence est soumise à ce principe sacré chez les coopératives : l’égalité des droits de chaque membre. En dépit de son rôle névralgique dans une organisation, notamment grâce au savoir dont il bénéficie par la nature de sa fonction, il n’en demeure pas moins que sa légitimité repose sur les épaules de l’ensemble des membres du conseil d’administration et de la coopérative. Sans la confiance des membres, la présidence devient vulnérable et peut être révoquée, soit par un simple vote des membres du conseil d’administration qui lui retirerait la fonction de dirigeant de la coopérative, ou encore par la voie d’une assemblée générale extraordinaire où une majorité des membres procéderait à la révocation du statut d’administrateur.

Il n’est pas rare de voir certaines personnes abuser de leur statut de président ou de présidente pour faire régner leurs volontés sur la coopérative, et causant souvent des dommages graves et irréversibles à une organisation. Les membres ne peuvent alors pas blâmer uniquement la présidence pour les fautes ainsi commises : leur négligence à demander des comptes ou révoquer une telle présidence constituera une faute tout aussi grave à l’endroit de l’organisation.

Si chaque coopérative fonctionne de manière autonome et adopte sa propre régie interne, il n’en demeure pas moins qu’elle doit s’assurer d’une bonne gestion des affaires de la coopérative, et ce en respect des règles d’action coopérative. La présidence assumera certes un rôle central dans l’administration de l’organisation, mais ce rôle est vide de sens si les membres n’agissent pas sans questionner leur présidence.

Après tout, un président ou une présidente de coop ne restera toujours qu’un membre parmi les membres.

Me Raphaël Déry
Avocat & Conseiller juridique de coopératives