Le Mouvement Desjardins et l’Alliance coopérative internationale (ACI) ont annoncé la tenue de la troisième édition du Sommet international des coopératives (SIC) du 11 au 13 octobre 2016 à Québec. L’équipe d’Ensemble a couvert les deux premières éditions en 2012 et en 2014. Si le premier sommet se voulait officiellement une démonstration de force économique en conclusion de l’Année internationale des coopératives, l’orientation encore plus économique et financière du deuxième sommet a laissé plusieurs coopératistes sur leur faim. Le troisième sommet ouvrira-t-il ses portes à la dimension sociale? Placera-t-il enfin l’humain au-dessus du capital, ce qui est simplement la base de toute coopération?

Invité à prononcer la conférence principale en 2012, Riccardo Petrella avait sévèrement critiqué les grandes coopératives, apportant une bouffée d'air solidaire dans un sommet où celles-ci étaient à l'honneur, et où on avait invité de grandes firmes privées à analyser leur puissance économique.

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En 2014, aucun Petrella n'a été invité en conférence d'ouverture. L'immense majorité des ateliers était à saveur financière, dans le programme constellé des mots «accroître», «investir», «développement», «financier», «leaders», «affaires», «marché», «productivité», etc. «La logique d'affaires est omniprésente», résumait le sociologue Louis Favreau en entrevue avec Ensemble. Ce sentiment général a été exprimé par quelques personnes interrogées sous forme de Vox Pop, mais de nombreux congressistes ont aussi trouvé leur compte dans les ateliers présentés:

Événement sélectif, international, le Sommet a déjà été décrit par Desjardins comme le «Davos des coopératives». Il fallait en effet débourser plus de mille dollars pour y entrer. C'est pourquoi un grand nombre de coopératistes québécois n'ont pu participer qu'aux activités présommet. Pendant ces quelques heures avant l'ouverture ont eu lieu de riches échanges intersectoriels et internationaux sur des enjeux, comme les alternatives à la croissance, que le Sommet lui-même n'a pas beaucoup abordé.

En entrevue avec Ensemble en 2012, Suzanne Gendron avait affirmé que les firmes privées étaient invitées afin «de les sensibiliser et de répandre la bonne nouvelle». Le deuxième sommet a plutôt semblé destiné à sensibiliser les coopérateurs aux impératifs de l'économie de marché.

Les coopératives, un monde d'hommes?

Autre manifestation de la dominante économique: beaucoup plus d'hommes que de femmes étaient invités à prendre la parole au Sommet. Comme le faisait remarquer une participante citée dans un autre de nos articles, «on a autour de la table principale des hommes du même âge qui représentent une forme économique qui n’est pas la mienne».

Hazel Corcoran, directrice générale de la Fédération des coopératives de travail du Canada, rappelle que l'égalité homme-femme est l'un des objectifs de l'ACI. «Souvent, illustre-t-elle pourtant, on avait sept panélistes dont sept hommes, ou six hommes et une femme.»

Cap sur l'humain?

L'annonce de ce troisième sommet promet toutefois un changement de cap. «Alors que les deux premiers sommets visaient à faire connaître et reconnaître le modèle coopératif, explique-t-on dans le communiqué, la prochaine édition illustrera l’influence réelle des coopératives dans l’économie locale, régionale et mondiale, en présentant des actions réalisées dans leur milieu.» Faut-il y voir plus d'intérêt pour l'échelle humaine et sa diversité?

Rien n'est moins certain: le communiqué indique aussi que le Sommet est «l’événement mondial de référence pour le développement des affaires dans le milieu coopératif et mutualiste». Jusqu'à maintenant, on y a en effet beaucoup plus parlé du «développement des affaires» que de la réponse au besoin collectif ou que de la participation démocratique des membres.