La gestion collective et démocratique, plus rentable qu’une multinationale ? L’entreprise LVL Global, dont les employés sont en partie actionnaires par le biais d’une CTA, a racheté et redémarré l’usine de fabrication de composantes de placages de bois lamellés (LVL) située à Ville-Marie. Jugée non-rentable par la multinationale Temlam qui l’avait fermée en 2008, l’usine semble aujourd’hui sur la bonne voie, malgré les difficultés que représente le marché actuel.

Bien que l’usine doive sporadiquement fermer ses portes pour des périodes indéterminées, son directeur général, Jean-Guy Côté, se montre optimiste devant la nouvelle tangente prise par l’entreprise, qu’il dirigeait aussi sous le nom de Temlam : « Le marché n’est pas facile. Lorsque les inventaires deviennent trop gros, on ferme pendant trois semaines, un mois. C’est ce que nous ferons tant et aussi longtemps que le marché ne sera pas redevenu comme avant. Mais l’entreprise reste viable. Nous sommes en communication constante avec les employés et, même si ça ne fait pas toujours l’affaire de tous, la fermeture temporaire est bien comprise. Ils voient comme nous l’inventaire grossir. »

Globalement, la formule coopérative semble réussir à fournir de bonnes assises à l’entreprise, dont presque tous les employés sont actionnaires par l’entremise de la CTA. Le climat général de travail démontre une implication accrue de la part des employés, ce qui permet aux dirigeants de prévoir une croissance tant au niveau des nouveaux produits qu’au niveau de l’importance que prendra la CTA. Selon M. Côté, la coopérative pourrait devenir actionnaire majoritaire dans un horizon de cinq à 10 ans. C’est également ce que constate le président de la coopérative, M. Mario Jacques : « Les employés sont plus impliqués directement à l’usine, même si avant aussi, c’était comme une grande famille. La CTA a quand même suscité un engouement de plus et assure une belle continuité pour l’entreprise. »

La pénurie de main-d’œuvre

Malgré le redressement bien amorcé de l’usine, elle doit faire face à la rareté de la main d’œuvre professionnelle qualifiée en Abitibi-Témiscamingue. Selon les renseignements fournis par Services Québec, plus de 11 500 emplois seront disponibles dans la région d’ici 2014. Le directeur général de LVL Global fait remarquer que cette rareté de main d’œuvre commence déjà à être problématique : « Dans les métiers spécialisés, c’est l’enfer. On manque d’électriciens et de mécaniciens. Ils sont tous rendus dans les mines et c’est impossible de concurrencer avec eux sur le plan salarial. »

Luc Fournier est le nouveau gestionnaire de CTA au sein de la Fédération des coopératives de développement régional du Québec (organisme partenaire du MDEIE). Le rôle que pourront jouer les CTA dans l’avenir, précise-t-il, sera d’autant plus déterminant pour l’économie et la main d’œuvre québécoise. Les repreneurs uniques qui auraient plus d’un million à investir dans l’acquisition d’une entreprise sont une denrée rare au Québec. Selon les statistiques du MDEIE, les 55 000 PME québécoises qui seront prêtes à changer de main d’ici 2018 risqueraient alors de tomber dans les mains des investisseurs étrangers. « Le MDEIE considère la CTA comme la formule privilégiée pour la relève PME et ce, parce qu’elle est l’unique forme qui permet de tenir compte des trois facteurs suivants : le PIB, la conservation ou même la création d’emplois et le maintien du patrimoine entrepreneurial québécois », souligne M. Fournier.

Comme l’illustre le cas de LVL Global, la formule des CTA favorise la pérennité et la productivité des entreprises grâce à l’implication accrue des employés, mais elle assure également la conservation et la création d’emplois sur le sol québécois