Le Québec est reconnu pour sa presse indépendante, mais qui aurait cru qu’un leader se trouvait en Gaspésie ? Avec 37 000 copies qui entrent chaque mois dans les foyers gaspésiens, le journal Graffici est le journal coopératif avec le plus fort tirage au Québec. Il a récemment annoncé le lancement d’une toute nouvelle plateforme web, qui lui permettra de rejoindre la Gaspésie qui sommeille en chacun de nous.

Lorsque le journal culturel Graffici, coopérative de solidarité, s’est installé à New Richmond en 2001, c’était dans une « volonté de doter la Gaspésie d’un média régional gratuit et de qualité fait pour et par les Gaspésiens », peut-on lire sur le site Internet du média. Dix ans plus tard, Graffici continue à s’imposer, par des « sujets traités en profondeur et une couverture non traditionnelle de l’information, affirme Benoit Trépanier, le nouveau directeur général du journal. C’est comme si on occupait un espace qui n’est pas occupé », ajoute-t-il. Les 37 000 copies distribuées gratuitement chaque mois rejoignent quelque 90 000 lecteurs.

À mi-chemin entre le journal et le magazine, Graffici a adopté un virage généraliste en 2007. Selon M. Trépanier, « se redéfinir a aidé au développement de Graffici. » C’est aussi ce qui lui a permis de survivre financièrement. Puis en traitant autant d’actualité, d’affaires, de culture que de divertissement, le mensuel est devenu plus accessible et davantage représentatif du quotidien des foyers gaspésiens. « C’est le fun, vous parlez de nous », aime entendre M. Trépanier de la part des lecteurs.

Coopérative d’information

La structure coopérative du journal le distingue également des autres médias. Les membres obtiennent le droit de vote et peuvent participer aux décisions en échange d’une cotisation annuelle. La différence s’arrête toutefois là. Comme les autres médias, le budget de fonctionnement de Graffici repose essentiellement sur ses revenus publicitaires.

Bien que les lecteurs soient encouragés à partager leurs commentaires avec la rédaction du journal,  il appert que peu participent aux assemblées du média. Arrivé en poste à la mi-juin, Benoit Trépanier en fait une priorité : « je veux augmenter la participation des membres à nos réunions. »

Pour Gaston Stratford, communicateur d’expérience et ancien conseiller à l’Institut de recherche et d’éducation pour les coopératives et les mutuelles de l’Université de Sherbrooke (IRECUS), « tout média coopératif devrait entretenir une relation privilégiée avec ses membres. »

« C’est le cas de toutes les coops, on s’attend à avoir des avantages », concède M. Stratford. Si le journal Graffici n’offre pas de réels avantages à ses membres, il n’en demeure pas moins qu’il offre un service collectif. Benoit Trépanier assure que les cotisations des membres permettent de « développer un sentiment d’appartenance au journal, en plus de contribuer à soutenir leur média papier ». Quant aux membres travailleurs, ils ont « l’avantage de contribuer à maintenir des emplois de qualité en région pour eux-mêmes », ajoute-t-il. Quoique les membres ne soient pas automatiquement des lecteurs de Graffici, les membres utilisateurs reçoivent certains rabais sur les services offerts.

Dès septembre, le web

Malgré que Graffici ait les pieds bien ancrés dans la communauté, les défis demeurent. Alors que tous se tournent vers les médias électroniques, M. Trépanier entend bien s’emparer du web à son tour. Une nouvelle plate-forme web d’information locale sera lancée dès septembre. Pour faire face aux plus gros joueurs, Gaston Stratford pense en effet que les médias écrits n’ont d’autre choix que d’envahir le web. Au passage, il ne peut s’empêcher de dénoncer l’attitude du chacun pour soi, trop souvent présente même chez des coopératives. Selon lui, elles n’auront un véritable impact que si elles collaborent ensemble. Du côté de la nouvelle plate-forme web de Graffici, son nouveau directeur prévoit déjà miser sur la collaboration avec d’autres médias communautaires afin d’enrichir son contenu.

L’indépendance de Graffici aura permis de redéfinir l’information locale en Gaspésie. Avantages réels ou pas pour les membres, Graffici est tout de même distribué gratuitement dans tous les foyers. « Pour et par les Gaspésiens », demeure sa mission. La plate-forme web lui permettra maintenant de rejoindre les gaspésiens de cœur ou de sang, au-delà les frontières gaspésiennes.